Les larmes d'Orphée

Un constat : dans les librairies, les rayons des grandes surfaces, on ne trouve pas de poésie. Certes les grands auteurs du passé, les Villon, Ronsard, Hugo, Baudelaire sont disponibles en collections de poche. Mais il n'existe pas d'équivalent à ce que sont les premiers romans - ou suivants - d'auteurs encore inconnus, que les éditeurs publient deux ou trois fois l'an. Pourquoi cette différence ?

La première raison est commerciale : un premier roman peut se vendre à 1000 ou 2000 exemplaires : il suffit que le thème concerne un certain public, que l'écriture ait quelque charme ; et un miracle est toujours possible : les 1000 exemplaires peuvent se transformer en 10 000, 20 000...

Avec la poésie, c'est autre chose : même reconnu par ses pairs un poète ne vend guère que quelques centaines d'exemplaires en un an ou deux ans ! Quant aux autres...

Non sans raisons les poètes se sentent lésés, frustrés. Pourtant, ils ont tort à mon avis de se figer dans une posture victimaire, laissant planer la suspicion d'un complot du "système" (capitaliste ?) contre la poésie. Quand bien même l'Etat interviendrait - ce que certains semblent souhaiter - pour instaurer une sorte de justice littéraire, ce n'est pas par décret qu'on obligerait chaque citoyen à lire et à aimer la poésie.

Quand la poésie a-t-elle été populaire ? N'embellissons-nous pas le passé trop facilement ? L'Ecole n'a-t-elle pas sa part de responsabilité ? Souvenons-nous des récitations laborieuses du primaire, des explications de textes filandreuses du lycée. Beaucoup gardent une image négative de la poésie qu'ils identifient comme un genre mièvre ou évanescent, ou bien comme des textes abscons que seule une poignée de spécialistes - professeurs, critiques - serait apte à comprendre. 

Ces visions sont caricaturales peut-être, mais non dénuées d'une part de vérité.

à suivre ...